Confrontés à un réseau de pistes incomplet, les cyclistes n’ont pas la partie facile à Montpellier et aux alentours.
Vélocité Grand Montpellier est issue d’une autre association, Vélocité Languedoc, créée en 1998. Elle rassemble et défend les cyclistes. Elle est présidée par Luc Nourigat, qui s’exprime ici sur la problématique vélo à Montpellier, en compagnie de Daniel Frayssinet et Hans Demes, membres de l’association.
Quelle est l’histoire du vélo à Montpellier ?
Luc Nourigat : À la fin des années 1960 et au début des années 1970, Montpellier était un vaste embouteillage et on y circulait assez facilement à deux-roues. Mais il n’y avait quasiment plus de vélos quand je suis revenu en ville au début des années 1990. Je me suis alors rapproché d’autres cyclistes et l’association est née. En 1995, nous avions rencontré Yvan Velay, adjoint de Georges Frêche, un visionnaire qui avait organisé les États généraux du vélo en 1999. On nous avait promis des merveilles mais on n’a pas vu venir grand-chose.
L.N. : à Montpellier, il manque une vision d’ensemble. Tout se fait au coup par coup. Et avec les communes environnantes, les liaisons sont difficiles. La Métropole a pris la compétence transport, mais la pratique du vélo n’est pas plus facile qu’avant. On a l’impression que ce n’est pas considéré comme un moyen de déplacement sérieux.
Il y a quand même de plus en plus de vélos…
Daniel Frayssinet : Oui, on assiste à un changement des mobilités. Le vélo en profite et a encore une grande marge de progression. Mais à Montpellier, il n’y a pas de cohérence entre les projets. Pourtant, dès qu’un équipement est adapté, il a du succès, à l’image de la passerelle sur le Lez, empruntée par beaucoup de jeunes qui travaillent au Millénaire.
L.N.: Il y a aussi la ligne 1 du tramway qui est devenue une autoroute à cyclistes, alors qu’elle n’était pas faite pour ça.
Hans Demes : Parallèlement, quand le pont de Sète (à côté de la gare) a été fermé à la circulation, aucune piste cyclable n’a été mise ne place, alors que ça s’y prêterait parfaitement.
Une piste cyclable est-elle synonyme de pratique en toute sécurité ?
D.F.: Non. Des voitures stationnent souvent sur les pistes cyclables pour prendre ou déposer des élèves devant des établissements scolaires. À La Pompignane, où je réside, des automobilistes s’arrêtent sur la piste pour téléphoner. À ces problèmes de comportement s’ajoutent des erreurs de conception. Comme au Millénaire où des arbres obligent les cyclistes à slalomer. Avenue du Pont-Trinquat, un arbre est carrément au milieu de la piste !
H.D.: L’itinéraire qui relie l’avenue Saint-Charles à l’avenue de Toulouse, en passant sous les Arceaux, est totalement inadapté. Rue Saint-Louis et rue Pellicier, la piste est mal conçue.
L.N.: Il y a aussi le problème des ronds-points. Plus ils sont gros, plus les voitures les prennent vite, comme celui du Grand-M. En matérialisant les pistes cyclables, on donne tout de suite de la visibilité… et de la sécurité aux vélos.
Que faudrait-il pour améliorer la vie des cyclistes ?
D.F.: Il y a trois ans, nous avions publié un livre blanc. Le premier objectif était d’arriver à un partage de la rue entre tous. À nos yeux, cela passe par une extension des zones limitées à 20 et 30 km/h, la généralisation du “cédez le passage au feu” pour tourner à droite, davantage de doubles sens cyclables, et une limitation des équipements routiers en pleine ville.
L.N.: Nous demandions aussi une politique cyclable cohérente. Car si on continue d’ajouter des mesures sans les relier les unes aux autres, on n’y arrivera pas.
# Vélocité Grand Montpellier, 23 rue de la Condamine. Site : ici ; courriel : montpellier@fubicy.com.
GUILLAUME RICHARD
Midi libre du 9-10-2018
LE BILLET de Guillaume Richard, journaliste au Midi Libre
“La petite reine” grandira
Des petits traits isolés les uns des autres. Voilà à quoi ressemble la carte des pistes cyclables à Montpellier. Quand on sait qu’« un réseau cyclable complet et sans coupure » et que« des itinéraires vélo rapides et directs » sont les deux premiers critères favorisant la pratique du deux-roues (selon le Baromètre des villes cyclables), on comprend que les Montpelliérains soient peu enclins à s’y mettre. Et que la ville hérite d’un classement « plutôt défavorable ».
Après avoir créé de nombreux axes routiers (1970-1990) et avoir lancé quatre lignes de tramway (1990-2012), la Ville s’est rappelé qu’il y avait aussi des piétons et des cyclistes.
Aujourd’hui, elle leur donne enfin la priorité. On peut critiquer les aménagements réalisés ou en projet, mais un troisième chapitre semble s’ouvrir dans l’histoire des déplacements à Montpellier. Le règne de la petite reine ne fait peut-être que débuter…